Tome 3 : Ange et Gardien; Episode 1 : Ma justice (Telagan)

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Il encaisse un peu le changement de ton que tu donnes à la conversion. Regardant le bout de ses chausses, plissant les lèvres de gauche et de droite, tu sens qu'il ravale sa salive et son orgueil avant de te taper sur l'épaule.

"Bah ! Il m'est parti un gamin des illusions plein la tête et il m'est revenu un homme de famille aux talents sacrés. Qu'est-ce que je peux bien faire sinon être fier, hein !"

Il ouvre la porte à grand fracas pour hurler :

"Allaïs ! Je suis rentré... et j'ai quelqu'un à te présenter.

Sors donc le vin du père Grégor et le lait !"

Tu vois alors descendre d'un escalier fort humble, entre les murs de pierres saillantes, un petit bout de brune aux membres potelés et à la bonhommie toute féminine. Enceinte de plusieurs bons mois, elle assure ses moindres pas dans sa descente. Elle ne lève les yeux qu'un fois arrivé à votre niveau.

"Allaïs, ma femme. Je te présente Telagan, mon bien aimé et bien retrouvé frère."

Son visage s'illumine alors que tu entends les bruits caractéristiques des enfants qui se disputent dans la pièce d'à côté.

Je ne laisse rien transparaitre en souriant simplement à la réplique de mon frère à mon égard, mais je ressens parfaitement sa souffrance de tant d'années d'absence derrière cette joie de me revoir.

Je suis extrêmement gêné par sa rudesse et ses exigences vis-à-vis de sa femme lorsque je la vois descendre tandis qu'elle est enceinte de plusieurs mois, sans doute ne lui en reste-il plus que pour un ou deux mois. Mais il en va ainsi dans ma 6e Couronne natale, la femme est chargée de l'entretien de la maison et du service quelle que soit sa condition physique, tandis que l'homme ramène de quoi faire vivre sa famille. J'ai un regard pour ma femme et retourne les mains au ciel l'air de dire "c'est une question d'habitude". Lorsqu'elle m'est présentée, en fanfare des brouhaha enfantins de la pièce voisine, je fais un pas dans l'entrée, lui tendant une main ouverte afin de lui faire un baise-main.

"Enchanté de faire votre connaissance Allaïs. Permettez-moi de vous féliciter par avance pour le futur agrandissement de votre famille."

Il est évident que j'ai entièrement perdu les manières de la 6e Couronne au profit de celles de mon royaume, ce qui peut paraitre désarçonnant pour les non habitués.

Je lui propos de l'aider à descendre les dernières marches avant de m'écarter afin de laisser entrer mon épouse, si elle le souhaite, ainsi que mon frère. Ce dernier que je serre dans mes bras au passage en lui tapotant légèrement le dos, lui faisant le même compliment qu'à sa femme.

Nullement gêné par les cris des enfants je dis simplement :

"Je t'en prie cher frère, ouvre-nous la voie."

Connaissant Bailli, le temps d'adaptation passé, elle sera très encline à la solidarité féminine, étant donné la timidité commune qu'elle possède avec l'épouse de mon frère, sous réserve de l'acceptation de cette dernière bien entendu.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Totalement inhabituée de la pratique du baise-main, elle la retire d'abord, les joues empourprées. Le deuxième essai est le bon, probablement grâce au regard rassurant de Marelagan.

En revanche, elle manque de perdre sa culotte quand elle voit Bailli aux longues ailes.

"Bonté de Kaen ! C'qu'est-ce que donc que tu nous as là ?"

Passées les explications rassurantes et autres civilités maladroites, vous vous retrouvez autour d'une table ronde d'aspect très inégal, signe de sa fabrication artisanale.

Une large échoppe de terre cuite entre les doigts, vous célébrez votre rencontre comme il se doit, bientôt rejoint par tes neveux. Allagan et Argeïs, les deux dernières, sont des morveuses de huit et dix ans. Se chamaillant pour un rien, elles portent des robes simples de coton propre qu'elles s'empressent de tâcher de jus de groseilles et de maïs. La plus petite, Argeïs, a tout particulièrement les yeux de ta mère, tandis qu'Allagan a plus le menton de ton père. Elle sera probablement laide en grandissant, te dis-tu.

L'intérieur est humble mais plutôt vivant. Les vanneries de cèdre ou l'étuve qui ronronne au-dessus du feu de cheminée, suspendue à une petite baguette de métal cranté, donnent un supplément d'âme charmant au foyer.

Un ou deux verres plus tard, c'est Mareïs, l'ainé de bientôt dix-neuf ans qui vous rejoint vêtu d'un tablier de forgeron. Sa peau a le grain de ceux dont la sueur vient de sécher :

"Père... je... Oh, pute vierge, Corlein ne mentait donc pas ! "

Il te regarde, un peu méfiant. Tu sens que son premier réflexe n'est pas vraiment de vouloir te sauter au cou.

Finalement la rencontre avec ma belle-sœur et mes nièces n'a pas été si compliquée que cela bien que nous n'ayons plus les mêmes coutumes. C'est surtout l'effet de surprise en voyant Bailli qui s'est dissipé plus rapidement que je n'aurais pu le croire. Lorsque je vois mes nièces, je suis heureux d'avoir Thalia pour fille, qui serait presque sage à côté de ses cousines. Nous discutions de la pluie et du beau temps, et j'étais en train de complimenter Marelagan et Allaïs pour leur goût de la décoration, lorsque mon dernier neveu est rentré de la forge. Je n'avais guère souvenir d'une telle vulgarité à l'époque.

Je recule lentement ma chaise pour me lever et faire face au nouveau venu. Je le salue simplement d'un signe de tête respectueux. Après tout je ne suis pas chez moi ici, ou plutôt, je ne le suis plus :

"Tu dois être Mareïs. Moi c'est Telagan, le frère de ton père." J'occulte volontairement de lui préciser "donc ton oncle", ce qui aurait pour effet de m'imposer à lui.

J'esquisse un léger sourire de bienveillance :

"N'aie crainte, je ne suis pas là pour vous causer le moindre tort à ta famille et à toi, ton père et moi nous sommes simplement croisés purement par hasard dans la forêt."

De facto je me positionne d'emblée en simple invité. Aussi je retire le plus précautionneusement qu'il puisse être mon épée de mon côté, ainsi que mon sceptre de mon dos pour les poser entre Bailli et moi.

Intérieurement je me dis que j'ai bien fait de me raviser quant à conduire Marelagan et Corlein chez nous. Kaen seule sait combien de personnes sont déjà au courant de notre présence dans la 6e Couronne.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Il oscille de la tête imperceptiblement, sans entrer davantage dans la demeure. Marelagan a une expression faciale différente de la seconde d'avant. Semblant hésiter, il se tourne vers toi de manière un peu gauche, indiquant d'une main ouverte :

"Hum, fils, jette donc un coup d'oeil à ces épées ! Enfin, si tu permets Telagan..."

Connaissant ta bienveillance, il prend la dépérienne, celle au pommeau à figure d'ange, suite à ton accord.

"Regarde le grain de cet acier, les pliures et surpliure ! L'équilibre malgré la sculpture, lestée de plomb à n'en pas douter, mais l'oeil n'y voit rien. Lourde, la bâtarde, encore que pour quelqu'un comme Telagan, une main suffise presque tout le temps... d'ailleurs tes épées ont-elles un nom ?"

Il semblerait qu'il cherche à distraire ou séduire son fils pour qu'il entre. A-t-il une mauvaise relation avec lui ou bien est-ce autre chose ? Toujours est-il que Mareïs s'approche, non sans t'adresser quelques regards en coin. Il soupèse l'arme, s'absorbe dans sa contemplation et semble malgré lui céder devant sa beauté unique.

Bailli a soudain un cri aigüe qui te fait sursauter. Mais ce n'est qu'Allagan qui reparaît sous la table, une plume de ta femme à la main. Furibarde, ta belle-soeur la poursuit avant de la rosser de quelques fessées méritées et de la congédier dans sa chambre.

Je peux comprendre que je suis un intrus à ses yeux, mais je n'arrive pas à déterminer ce qui le gêne chez moi, outre le fait que je sois un homme doté de pouvoirs magiques et de talents inhumains. A moins qu'il s'agisse d'un tout autre problème familial, mais là je n'y pourrais pas grand chose.

Je hoche la tête affirmativement :

"En effet mon frère, celle que tu tiens entre les mains m'a été offerte par le Prince de Dépérion il y a de cela déjà une vingtaine d'années, lorsque nous avons repoussé les contrebandiers du Troisième Voile, loin de la Cité Princière. Aussi je l'ai appelé du nom de cette Cité, Lanciel."

Je sépare mon sceptre en deux et dégaine la seconde pour la tendre à Mareïs :

"Celle-ci est toute particulière, elle a été forgée spécialement pour moi par le Multivers lui-même, lorsque je suis parti en quête de mon sceptre. Je l'ai nommé Esperita, car elle est le reflet de mon esprit. C'est avec elle que j'ai mené mes premières campagnes militaires."

Je sens que je risque de les embrouiller un peu trop avec les origines des noms de mes lames. Je porte ma choppe à mes lèvres dégustant la boisson qui m'est si généreusement offerte.

Tandis que je les écoute faire leurs observation, je sursaute vivement lorsque Bailli pousse un cri aigüe. Instinctivement je pose une main sur son poignet, puis vois l'une de mes nièces, Allagan, sortir de sous la table, une plume de mon épouse à la main. Ce n'est jamais très amusant de se faire tirer sur les poils, il en va naturellement de même lorsqu'il s'agit de plumes. Alors qu'elle se fait vertement enguirlander, comme l'a pu l'être Thalia la veille devant Kaen. Je dis simplement :

"Sans doute a-t-elle souhaité vérifier qu'il s'agissait bien de vraies plumes."

Sentant qu'un certain malaise s'installe de plus en plus, et après avoir croisé le regard de mon épouse, je m'excuse auprès de nos hôtes :

"Nous n'allons certainement pas trop tarder, nous ne souhaitons pas abuser de votre hospitalité, de plus nos enfants doivent être rentrés et commencer à s'inquiéter de notre absence prolongée."

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Mareïs reste absorbé par sa contemplation, murmurant quelques notes pour lui-même.

"Définitivement pas de l'acier que l'on peut trouver sur Centile."

Te rendant les épées, vous entendez les bruits de la forêt un ton plus haut. Ton frère tente de te retenir :

"Mais pas du tout, tu ne me déranges pas mais si tu dois aller ch..."

Il interrompt sa phrase quand une biche passe sa tête par le pas de la porte, les yeux fous, avant de repartir aussi vite. Ton forgeron de neveu sort la tête dehors, les sourcils froncés.

"Les animaux sont agités... qu'... Père ! Regardez !"

Vous sortez tous au dehors alors que le soleil décline donnant une teinte rouge rosée à l'horizon au-dessus des arbres. Non, tu connais ce genre de lumière, tu l'as déjà vue.

Il y a un feu quelque part.

Je fronce les sourcils et serre les mâchoires ainsi que les poings sur la garde de mes lames. Ma prémonition refait surface dans mon esprit. Une épée dans chaque main, c'est avec un regard noir de colère que je dis :

"Un incendie criminel...Les enfants...!"

Je m’adresse à mon frère :

"Restez chez vous et enfermez-vous."

Je ne prends pas le temps de ménager mon frère et sa famille avant de parler dans le langage de Eä afin que Jag prenne sa forme originelle. Je saute sur son dos d'un mouvement souple, les lames croisées face au ciel. Signe d'une préparation à une bataille.

"Bailli suis-moi, les enfants sont en danger !"

Je sens instinctivement qu'un grand danger pèse sur ma famille. Une pression des cuisses sur les flancs de ma monture et je m'apprête à m'envoler vers la zone incendiée.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Ton frère ne veut pas vraiment être mis à l'écart si ses neveu et nièce sont en danger. Malheureusement, il doit bien s'incliner quand ta femme et toi vous prenez votre envol.

Vous voletez par dessus les puissants cèdres dont les cimes défilent à vive allure pour trouver l'origine des premiers nuages de fumée. Dans un village non loin vivote un départ de feu qui te rappelle d'amères souvenirs. La bâtisse est haute et facilement combustible, nul doute que les flammes dansantes gangrèneront très vite les constructions voisines toutes en paille et en bois massif.

On s'agit à l'extérieur, non pas pour éteindre le feu mais plutôt pour se battre à coup de beignes et d'armes improvisées. Aucune lame n'est dégainée semble-t-il, mais tu ne pourrais en jurer. Dans toute cette cohue, tu ne distingues pas ta fille.

A toi de voir si tu désires arriver en posant lourdement ton destrier écaillé ou si tu préfères arriver discrètement. Mais la vie de ta fille est en jeu n'est-ce pas ?

Fugace, un reflet de jais attrape ton regard. La chevelure de Thalia, tu le sens au fond de tes entrailles de père.

Je suis concentré sur la chevelure de jais que, je sais être celle de ma fille parmi toute cette foule en train de se cogner dessus pour je ne sais quelle raison. Malgré la tentation forte de me poser brutalement pour calmer la foule, je décide de me contenir, sachant qu'une apparition soudaine d'un dragon créera plus un sentiment de terreur que de respect. C'est donc dans mon rôle de Gardien du Multivers que je ferai mon entrée en scène, et non des moindres.

J’atterris à une certaine distance du champ de bataille improvisé incitant ma femme à faire de même, puis je commande à Jag de réduire de taille pour se repositionner sur mon épaule. Je couvre ma tête de mon capuchon pour dégager plus de puissance et de mystère. Je ne quitte jamais du regard la chevelure de Thalia.

"Je sens la présence de Thalia non loin d'ici. Suis-moi." Je ne lui donne pas plus de détails, elle la verra bien par elle-même, et je ne souhaite pas l'affoler en lui donnant sa position si elle ne l'a pas vu.

En une demie seconde après avoir rengainé mes épées, je me trouve à la fois hors de vue des badauds, sans pour autant qu'ils soient hors de ma propre portée. Le vent aidant, le feu menace de rapidement se propager aux logements voisins, mais surtout, crée de fortes ondulations sur ma cape.

Je ne quitte guère ma fille des yeux.

[Caméra dynamique]La puissance du vent prend des allures inquiétantes. Un unique nuage magique noir se forme au-dessus de la bâtisse en flammes. Un éclair inoffensif éclate laissant apparaître la silhouette de Telagan et de son épouse à la vue de tous. Une pluie s'abat sur la bâtisse, commençant à éteindre le feu. [/Caméra]

La puissante voix grave du Prince de Dépérion explose dans cet atmosphère lugubre et pesant imposé par celui-ci :

"Assez !"

Ma posture met en valeur toute ma puissance, au point de me faire paraître comme une apparition divine à leur yeux.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Bailli ne l'entend pas de cette oreille là et fonce directement dans la masse, te laissant sur place. Tu te rappelles subitement qu'elle était aussi une combattante aguerrie avant même de te rencontrer. Son crochet du gauche étale un premier bougre aviné tandis que son coup de tête arrête net le ladre qui voulait lui aplatir un bout de banc sur le crâne. Plusieurs hommes dans la mêlée se figent, sidérés. Ses ailes doivent sûrement participer à la stupéfaction.

Tu débarques peu après, et deux éclairs inattendus éclatent juste avant que ta voix ne s'élève. Saisis, la plupart des fauteurs de trouble ont un mouvement de recul et se tourne vers toi, la montagne armée et armurée. Porteur de Sceptre.

Le mouvement se figeant, tu aperçois enfin distinctement Thalia sur une table en train de tenir une brute de deux têtes de plus qu'elle. La cruche en terre cuite qu'elle tient dans la main était prête à s'abattre sur l'oeil déjà beurré de noir de son adversaire quand elle interrompt son mouvement.

Sa tête se tourne lentement vers toi. Son rictus de haine se change en moue peureuse, de celle qu'elle a quand elle va encore se faire engueulée.

Sans te quitter des yeux, comme si tu n'allais pas le voir ou bien parce qu'elle n'en était plus à ça près, elle achève son mouvement pour fracasser le pot sur la tête du mauvais bougre. Il s'effondre en lui glissant des mains alors que la pluie s'abat sur vous tous, dissipant le feu et, bientôt tu le sais, la foule.

Je n'avais pas oublié que Bailli était une excellente guerrière rodée aux combats de mêlées, seulement, je ne pensais pas qu'elle se rabaisserait au niveau des centiliens tous aussi alcoolisés les uns que les autres. Toutefois, ce qui m'a sans doute retenu de faire moi-même un carnage, c'est de savoir ma fille dominer son adversaire, certes peu dans les règles. Ce qui m'intéresse désormais c'est de savoir les raisons de ce champ de bataille à me faire pitié. Mais aussi et surtout ce que diantre fait Lothar qui était censé surveiller sa sœur !

La pluie n'a aucun effet sur moi, je peux rester à l'extérieur qu'il pleuve, qu'il vente, ou qu'il neige. En revanche, il n'en est pas de même pour le reste de la population. Aussi, d'un vif mouvement lattéral imperceptible à l'oeil nu, je me faufile tout près de ma fille tout en saisissant deux hommes assez robustes par le col, les soulevant à bout de bras telle des poupées de chiffons. J'ai un regard pour Thalia sans pour autant la plaindre. Je secoue les deux hommes avant de lancer :

Expliquez-moi comment une beuverie d'ivrognes a-t-elle pu entraîner une bagarre générale en présence d'enfants ainsi qu'à l'incendie de cette bâtisse !

Ma question ne s'adresse pas uniquement aux deux malchanceux mais à toute la population. D'ailleurs je reprends :

Que personne n'ait l'intention de quitter ces lieux sans qu j'aie une réponse très claire ou ça ira mal pour le matricule des fuyards !

Un coup de tonnerre appuie mes propos.

Mon regard, seule partie de mon corps visible pour la majorité, est dur et lourd de sens :

Vous avez su mettre le feu à ce bâtiment, il va falloir subir et supporter les conséquences du courroux de la Justice. Ce sera votre première pénitence !

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Si tu es bien suzerain sur Dépérion, ici les braves gens ne te connaissent guère. Aussi fuient-ils tous, vidant la place assez rapidement. Thalia peste à ta première phrase :

"Je ne suis plus une enfant !!" braille-t-elle.

Parmi ceux qui restent, hormis les deux pauvres soulards que tu as attrapé, tu comptes le malheureux tenancier et sa femme qui viennent te voir les yeux embués d'espoir.

"C'est qu's' ont commencé à s'batt' M'seigneur. Sont mis à cogner, pis, avant que je peux ramener l'ordre, l'ont tout jetté les tables des uns 'ssus d's'autres.

C'est que la gamine l'y a causé mal avec s'airs d'princesse..."

"Ils m'ont touché les fesses, Papa !!!" crache Thalia en savourant l'horreur du visage du propriétaire des lieux qui comprend soudain que tu seras partisan dans l'histoire.

Je laisse tout simplement tomber les soulards à mes pieds. Je ne compte pas faire le procès de ma fille en public, toutefois je lui fais clairement comprendre qu'elle peut ravaler sa fierté d'être aux côtés de "papa" :

"Comprends-tu désormais pourquoi je ne souhaitais pas te laisser te promener seule ma fille ? Tu n'es peut-être plus une enfant, mais cet évènement me prouve que tu n'es pas prête de vivre ta vie d'adulte. Combien de fois t'ai-je dit que le monde extérieur n'était pas comme dans un conte de fée comme tu t'imaginais l'être ?"

Je dissipe le nuage magique afin que l'orage et la pluie cessent lorsque le feu s'est complètement éteint :

"Qu'as-tu à me dire concernant ton comportement qui aurait été le point de départ de ce champ de bataille selon les dires du tenancier de cette auberge ?"

Je porte une main à ma ceinture pour en détacher une bourse remplie de Nyaas. J'en sors quelques pièces que je pose dans la main du propriétaire :

"Ceci devrait vous permettre de restaurer votre auberge mon bon Seigneur. Vous me voyez navré des conséquences de ce sinistre sur le fruit de vos ressources."

Je suis véritablement déçu de n'avoir pu faire confiance à mes enfants. Lorsque j'aurai eu les explications de Thalia, et si les tenanciers n'ont rien à ajouter, je ferai reprendre le chemin du retour à ma famille demandant en chemin, ou plutôt en vol, lorsque nous seront hors de vue des paysans, ce que faisait Lothar qui était censé surveiller sa sœur pour qu'un tel évènement n'arrive pas.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Le propriétaire de l'estaminet partiellement détruit accepte l'argent de bon coeur en s'inclinant vivement. Pour lui, nulle doute que tu es un grand seigneur car tu lui donnes largement de quoi compenser ses pertes.

Thalia tempête toujours :

"Je n'ai rien fait ! L'autre malotru m'a peloté, je lui ai dit de cesser céans et ils se sont mis en tête de me forcer à boire et on recommençait de plus belle. Y en avait pas un pour me défendre... après... après ça a dégénéré."

"Maître Rebryn !!" hurle une voix haletante. Tu reconnais le jeune Corlein en te retournant bientôt suivi de ton frère et de ton neveu.

Tu remarques l'apprenti bloque un instant lorsqu'il aperçoit ta fille. Il allait dire quelque chose mais Mareïs le devance, sa poitrine luisante sous son tablier de forgeron accompli :

"Tout va bien Mademoiselle, vous n'êtes pas blessée ?"

Malgré ses mains d'artisan, il a, sans la toucher, des manières d'une noblesse qui feraient oublier son origine modeste. Des égards princiers, quelque chose qui vient du sang. Alors qu'il ne la touche même pas, ta fille peine à articuler un "non tout va bien, je vous remercie" qui se contracte en un bredouillement de pucelle qui s'empourpre.

Tandis que ma fille s'enflamme pour justifier son comportement je fais un geste calme de la main vers le bas :

"Je ne te blâme pas de ton comportement ma fille, je ne porte de jugement que lorsque j'ai tous les éléments. Aussi as-tu eu raison de ne pas te laisser faire et de ne pas te laisser tenter par l'alcool."

Entendre mon nom sonne toujours étrangement à mon oreille lorsque l'appel ne m'est pas destiné. Je ne suis guère étonné de voir mon frère et mon neveu précédés de Corlein. En revanche ce qui me surprend un peu plus c'est le frein net de l'apprenti lorsqu'il arrive devant ma fille. Un sourire se dessine sur mes lèvres, celui-ci s'élargit d'autant plus lorsque Mareis s'adresse à ma fille avec des manières princières, mais surtout le silence gêné de celle-ci en guise de réponse à sa question des plus simples.

Je rabats ma capuche avant de m’adresser à l'apprenti forgeron de mon frangin :

"Eh bien Corlein, on croirait que tu as vu un fantôme ?"

Puis à ma fille en me penchant à son oreille :

"Tu en as de la chance princesse, je n'ai pas eu le droit à une telle cérémonie moi !", Je dis cela tout en faisant un clin d’œil à mon neveu. En me faufilant ensuite pour rejoindre Bailli juste à côté.

Il me suffit de peu pour décolérer. Après tout j'ai commis des actes bien plus graves au cours de ma jeunesse, il faut tout de même savoir faire la part des choses.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Tous les enfants se détournent de toi comme ils le peuvent, ne voulant pas subir les commentaires qui paraissent toujours lourdingues quand ils sont faits par un aïeul.

Tu entends ensuite un battement d'ailes au-dessus de ta tête, c'est Lothar qui revient, tout en sueur. Immédiatement, il maugrée envers sa soeur :

"Bon sang, Thalia, 30 minutes... je te demandais juste 30 minutes !"

Si la place est vide, tu es certain d'être épié de toute part... car on rencontre rarement autant de créatures volantes dans les parages. Tu sais bien comment fonctionne la Couronne et ce qui arrive quand survient l'étrangeté parmi le petit peuple.

Je croise les bras sur ma poitrine lorsque Lothar arrive tout en sueur pour enguirlander sa sœur. Le mal est fait, c'est bien tard pour faire preuve de l'autorité que je lui avais déléguée pour veiller sur elle. Sans faire montre de colère devant toute la famille réunie élargie à mon frère et Mareis, je dis simplement les choses de telle manière que le poids du reproche pour faire culpabiliser ne soit guère loin :

"Je constate simplement que vous avez échoué à la mission que votre mère et moi vous avions attribué. Nous verrons pour les conséquences de cet échec lorsque nous serons rentrés."

C'est sans appel, la sanction sera immédiate, et ils le savent, l'un comme l'autre. Je suis sévère mais juste, surtout lorsque tout un village menaçait d'être détruit. Je remets à plus tard les réprimandes tout en laissant planer l'épée de Damoclès au-dessus de leur tête.

Je couperais net aux discussions tournant autour de cette histoire si d'aventure l'un ou l'autre de mes enfants, tel que je les connais, décidait de protester, en levant simplement une main signifiant que la discussion est close, pour le moment.

Je décroise les bras et me place entre mes deux enfants puis je passe du coq à l'âne comme je sais bien le faire lorsque je veux veux éviter les débats inutiles :

"Nous avons mis notre journée à profit puisque nous avons rencontré votre oncle et son apprenti tandis que nous vaquions en forêt, puis avons fait connaissance avec sa famille dont Marëis ici présent." J'esquisse un sourire tentant de détendre un peu l'atmosphère.

Je laisse le temps à chaque intéressé d'être plus disposé avant faire les présentations ainsi que de proposer de marcher un peu, tous ensembles. Ce village me semble un peu trop néfaste pour de telles rencontres d'autant plus que je sens que nous sommes le cœur de l'attention d'une bonne représentation de la 6e Couronne.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Tes enfants savent bien qu'il est inutile de contester et se contentent donc d'échanger des regards lourds de sous-entendus.

Vous marchez alors que Corlein reste toujours aussi interdit face à Thalia. Mareïs, lui, t'interpelle :

"Nous devrions rentrer au plus vite, il ne fera guère plus d'une journée pour que tout le comté soit au courant de... enfin que des êtres venus d'ailleurs sont ici. Le Seigneur D'Ironhalo voudra certainement vous retrouver si la folie lui prend de croire les racontards."

Puis, plus sévère alors que son père allait dire quelque chose :

"C'est toute notre famille que vous venez de mettre en danger."

Marelagan se tait, déchiré entre le fait qu'il n'ait pas tord et son envie de profiter de toi sans l'ombre d'un soucis. Thalia semble encore plus meurtrie par cette dernière phrase et tu pourrais presque la voir trembler quand elle dit avec des tremolos dans la voix :

"Je... je suis... je suis désolée. Je ne voulais pas..."

Au fil du discours de Marëis, une veine vient barrer mon front signe d'un grand mécontentement. Mon regard se durcit :

"Le Comte Ironhalo n'aura guère besoin de nous faire la chasse car je me rendrais moi-même sur son domaine. Il est temps que les mentalités changent. Il n'y a guère que Centile qui soit hostile aux étrangers de la sorte. Le Gouvernement crée même des règles autour desquelles les centiliens ne manquent pas d'inventer des contes d'épouvantes. Je songe ici au fameux article 42-3 de la Constitution. Parce qu'une personne est dotée de capacités dépassant les limites de l'entendement humain et scientifique, il faut lui faire la chasse, car c'est une personne anormale et dangereuse. C'est malheureusement en vous incorporant ce genre de chose dans le crâne que l'on vous monte les uns contre les autres...Y compris au sein même des familles où certaines ont pu dénoncer leur propre progéniture douée d'un don. Partant de là, toute personne étrangère est présumée nuisible et doit être éliminée."

"On peut me critiquer autant que l'on veut, mais je ne tolèrerais pas que l'on touche à un seul cheveu de ma famille. Mes enfants au premier rang. Ils ont beau faire des erreurs plus ou moins grossières, ils resteront la chair de ma chair et Kaen sait à quel point je peux me montrer intolérant lorsqu'ils sont menacés, fusse-t-il indirectement. A fortiori, il en est de même pour l'ensemble de notre famille."

Mes poings se serrent et mes doigts craquent dans un bruit sourd. J'accélère le pas, marchant plus vite que tout le monde avant de ralentir et de me retourner tandis qu'ils sont tous derrière moi.

Je fais un geste que je n'ai plus fait depuis de nombreuses années, je tourne la tête sur le côté et crache sur le sol. Je fixe ensuite mon frère avant de conclure :

"Rentrez chez vous, je ne souhaiterais pas vous mettre plus en danger."

C'en est trop, mes enfants ont beau avoir commis une erreur somme toute importante, j'endosse toute la responsabilité et je n'accepte pas que ma femme et mes enfants soient traités de la sorte.

Puis pour moi-même mais tout de même à voix haute, tout en refermant une main sur l'amulette que je sors de sous mon armure :

"Par Marmin ! Et dire que j'ai accepté la mission de Kaen d'empêcher la gangrène de Centile d'empirer...Horazon serait presque plus accueillant."

Je contemple l'amulette en silence.

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

SI tes enfants n'osent plus aller à l'encontre de tes intentions, c'est ta femme qui s'exprime pour tous :

"Mais qu'est-ce que tu veux dire ? Qu'est-ce que tu vas faire ?!"

Connaissant trop ton tempérament, elle s'inquiète du danger au-delà duquel tu sembles vouloir aller. Elle a entendu tant de choses sur Centile que sans doute préférerait-elle que tu affrontes toute une armada de galion de contrebandiers plutôt qu'un potentat de 6^eme Couronne.

La voix de ma femme me calme quelque peu. Si je suis amené à rencontrer le Comte Ironhalo, nul doute que l'on se souviendra de mon passage dans cette dimension. Mais de quelle manière souhaiterais-je que l'on se souvienne de moi ? Je range mon amulette avant de relever lentement la tête et de poser mon regard dans les yeux de ma femme, qui semble complètement craintive pour ma vie alors qu'elle me laisserait affronter des armées entières de contrebandiers. Sans doute le système politique anti étranger de Centile lui fait-il peur. Je me calme complètement avant de reprendre la parole :

"Tout dépendra des intentions du Comte ma douce, une chose est sûre néanmoins, je n'ai pas l'intention de jouer au chat et à la souris avec lui. Si comme le dit Marëis, notre famille est en danger en raison des évènements qui se sont déroulés aujourd'hui, et que le Comte Ironhalo a l'intention de nous chasser de lui-même, je n'exclurais aucune hypothèse quant à l'écho que je pourrais lui opposer."

Je caresse ses plumes avec mes doigts en revenant à ses côtés :

"Mais j'ose espérer qu'il fera preuve d'une grande intelligence et préférera mettre à profit notre présence sur son comté pour envisager des échanges civilisés et fructueux. Mon intérêt est de démontrer que nous autres 42-3 et étrangers, ne sommes guère plus à craindre que n'importe quel villageois."

Un sourire se dessine sur mon visage :

"Après tout, n'importe quelle jeune femme présente dans cette auberge, n'aurait-elle pas fait l'objet de railleries de la clientèle masculine avinée, qui aurait déclenché une telle émeute et donc l'incendie de cet auberge ? Si en l'espèce notre présence peut paraître inopportune, dans une autre situation similaire, il n'est pas certain que les flammes aient été éteintes avant que l'incendie ne se propage aux autres bâtisses, en entrainant des conséquences bien plus dramatiques."

"Je ne souhaite pas tomber dans la politique Centilienne mais simplement démontrer que les personnes différentes ne doivent pas être craintes et encore moins chassées du seul fait de leur différence. La 6e Couronne pourrait être le berceau d'une nouvelle tolérance. Je crois qu'un malheureux évènement malencontreux et banal pourrait être l'étincelle d'un changement."

Je rêve certainement pour que mon idéal se réalise aussi facilement. Néanmoins, si cela pouvait fonctionner ne serait-ce qu'un minimum, ce serait un bon début. Je suis sûr que la 6e Couronne regorge d'individus dotés de dons. Si je pouvais tourner notre situation à notre avantage, non seulement j'augmenterai mon cercle d'influence local, mais cela me permettrait aussi de m'acquitter de ma lourde quête pour laquelle, ledit cercle d'influence me sera indispensable.

Mon rôle d'ennemi public numéro 1 de Centile ne doit plus me coller à la peau comme par le passé, bien au contraire, je dois faire en sorte de me présenter comme un allié de taille et indispensable. L'Artisan ne disait-il pas que j'étais très certainement le Gardien le plus intègre du Multivers ?

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Ils restent assez déconcertés par ton speech qui ne répond pas vraiment davantage à leur question : là, tout de suite, maintenant, qu'est-ce que tu vas faire ?

C'est Mareïs, peu convaincu, qui enfonce le clou :

"Des belles paroles qu'on a déjà entendu ici je suis sûr. Mais les actions ?

Moins facile de se montrer la langue pendu devant des miliciens en bataillon de cent."

Sa bravade est affichée comme un camouflet, mais l'espoir ne demande qu'à naître quelque part.

Je me tourne vers Marëis puis réponds simplement à sa réplique qui se veut ferme :

Lors d'un affrontement le nombre d'opposants importe peu. L'essentiel est d'évaluer et d'exploiter les faiblesses des forces qui te sont opposées.

Je peux paraître complètement illuminé de parler ainsi alors que je serai seul contre cent, mais seules mes techniques martiales mises en application pourraient illustrer cette phrase philosophique et abstraite. Je réponds donc à leur question très simplement :

Pour l'heure nous rentrons chacun chez nous, et continuons à vivre notre vie, nous ne ferons pas de plan sur la comète tant que le Comte et son bataillon n'aura pas montré le moindre signe d'intentions malveillantes à notre égard.

Puis comme pour démontrer le caractère secondaire que j'accorde à cette hypothèse je m'adresse à Lothar :

M'as-tu apporté des journaux intéressants concernant les activités centiliennes les plus récentes mon fils ?

Admin Messages : 7168 Date d'inscription : 20/09/2009

Lothar a un regard désolé, sa culpabilité est déjà à un niveau difficilement tolérable et cette dernière couche achève de le déprimer.

"Ils... apparemment, ils ne connaissent pas ça ici. Je veux dire, j'ai parlé d'imprimerie mais... je crois que c'est à peine si l'un d'entre eux savait lire... c'était, enfin, nous avons essayé d'entendre ce qu'il se disait du coup, mais hormis quelques histoires de chicanieries entre voisins pour une vache ou une plainte auprès de leur Seigneur..."

Puis, avec un peu plus d'aplomb,

"Ce n'est même pas la ville ici ! Il faudrait aller près du chateau de leur Seigneur... c'est un trou paumé cet endroit, à peine quelques centaines d'âmes... sauf votre respect," lance-t-il en direction de son cousin et de son oncle.

C'est vrai qu'à côté des millions d'anges de Lanciel, c'est complètement vide ici. Même le désert interurbain connaît des villes-oasis plus peuplées.